Caorle, sur la rivière vénitienne...

Les maisons du vieux Caorle ressemblent à la palette d'un peintre où des monticules de couleurs sont disposés l'un à côté de l'autre un peu au hasard, selon la fantaisie sans logique du peintre. Or, de cette fantaisie colorée il ressort une impression d'équilibre, ou plus tôt: nos yeux ne perçoivent aucune gène dans ce désordre. C'est parce que les couleurs ont leurs règles et le non respect de ses règles crée des déséquilibres que nos yeux perçoivent immédiatement. Ces règles sont ici respectées dans la couleur ocre de la maison de gauche qui est le parfait complément du bleu de la maison de droite. Et le rouge foncé de la maison en recul vient presque parfaire un triangle de couleurs complémentaires. Mais la complémentarité des couleurs dans ce vieux bourg fût-elle vraiment recherchée par les peintres? Ou bien, selon toute vraisemblance, n'est-elle que le fruit du hasard, le fruit de la fantaisie des propriétaires à qui la couleur plaisait? Peut-être... certainement... mais...

Couleurs complémentaires
... je suis convaincu que les choix que nous faisons, même ceux longuement réfléchis, sont influencés d'une façon plus ou moins importante par notre inconscient. Celui-ci, comme la face cachée de la lune, nous est invisible mais il existe bel et bien. Il est le beau de l'homme par la fantaisie, la diversité et le brin de folie qu'il nous apporte. Il est le brin de lumière soudain et inexpliqué qui nous illumine tout d'un coup quand on s'y attend le moins. Il nous guide vers un équilibre humain que nous avons perdu avec notre rationnalité car il est le dépositaire, notre mémoire en quelque sorte, des lois ancestrales de la nature, des lois qui régissent le beau et du sentiment de l'au-delà.
Deux choix conscients choisis inconsciemment...

Depuis l'heure de l'enfance, je ne suis pas semblable aux autres; je ne vois pas comme les autres; je ne sais pas tirer mes passions à la fontaine commune.
D'une autre source provient ma douleur.
Jamais je n'ai pu éveiller mon coeur au ton de joie des autres.

Et tout ce que j'aimai, je l'aimai seul.

C'est alors, dans mon enfance, à l'aube d'une vie de tumulte que fut puisé à chaque abîme du bien et du mal, ce mystère qui toujours me retient.
Au torrent et à la fontaine, dans la falaise rouge de la montagne.
Dans le soleil qui roule autour de moi en son or automnal.
Dans l'éclair qui volait au ciel et passait près de moi pour s'enfuir, dans le tonnerre et dans l'orage.
Et dans le nuage qui prenait la forme (alors que le reste du ciel était bleu) d'un démon à mes yeux.
Edgar Alan Poe
 
Les chaises rouges



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